2 Fonctions exponentielles¶
2.1 Définition¶
Dont le graphe est une succession de points non continue :
Nous aimerions étendre cette fonction sur . Mais pas de n’importe quelle manière. Un prolongement tel que la fonction :
dont le graphe ressemble à :
Théorème 2.1.1 (Théorème de prologement par densité).
Soit une fonction qui est Cauchy-continue.
Alors il existe une unique fonction qui est un prolongement continu de sur .
est Cauchy-continue, ce qui implique que le théorème de prolongement par densité garantit l’existence d’un unique prolongement continu de sur .
Définition 2.1.2. Soit .
La fonction exponentielle de base , notée , est l’unique prolongement continu sur de la fonction :
Remarque 2.1.3. Par continuité, le graphe de la fonction ressemble par exemple à :
Cette fois-ci, comme la fonction est bien définie sur tout et pas seulement sur , le graphe de la fonction est bien un tracé continu.
Remarque 2.1.4. Pour tout , nous sommes déjà capables d’évaluer les fonctions en tout nombre rationnel. En effet, puisque les fonctions sont les prolongements continus des fonctions exponentielles sur , si , le nombre est tout simplement au sens des exposants rationnels. En particulier, pour tout , le nombre est c’est-à-dire et le nombre est c’est-à-dire . Géométriquement, cela correspond au fait que le graphe de toute fonction exponentielle passe par les point et .
Notation. Même si elle est au moins dans un premier temps un peu abusive, la notation suivante est utilisée pour désigner les images des fonctions pour :
Pour tout (même quand n’est pas un nombre rationnel), on note :
Comme les fonctions exponentielles sont les prolongements continus des fonctions exponentielles sur , il n’est pas étonnant que l’on reprend la notation des expressions formelles de ces fonctions. Nous verrons que cet abus de notation prend tout son sens en étudiant les propriétés des fonctions exponentielles dans la prochaine section.
Remarque 2.1.4. Le sens d’une notation telle que ne vous est donc plus inconnu. Il s’agit tout simplement de . Malheureusement, le théorème de prolongement par densité ne nous dit absolument pas comment calculer cette quantité. Sans la démonstration de ce théorème, nous ne pouvons même pas estimer ce nombre et cette nouvelle connaissance du sens de la notation est honnêtement assez insatisfaisante. Malheureusement, nous ne pourrons pas remédier à cela dans ce cours.
2.2 Propriétés élémentaires¶
Listons à présent les propriétés élémentaires de nos nouvelles fonctions de référence : les fonctions exponentielles. Toutes ces propriétés découlent directement du fait que les fonctions exponentielles sont définis comme prolongements continus des fonctions exponentielles sur . Malheureusement, nous n’en démontrerons aucune dans le cadre de ce cours.
Proposition 2.2.1. Soit . Le domaine de définition de la fonction est .
Proposition 2.2.2. Soit .
Si , l’image de la fonction est .
Si , l’image de la fonction est .
Proposition 2.2.3. Soit .
Si , la fonction est strictement décroissante.
Si , la fonction est constante.
Si , la fonction est strictement croissante.
Exemple 2.2.4. Par exemple, si , la fonction est strictement décroissante :
Si , la fonction est constante :
Si , la fonction est strictement croissante :
Remarque 2.2.5. Le “type de croissance” des fonctions exponentielles est différent de tous ceux des autres fonctions que vous connaissez. Par exemple, si , la fonction est strictement croissante et cette croissance est de plus en plus forte au fur et à mesure que augmente. Pour passer de à , on multiplie toujours par , ce qui donne une croissance explosive de plus en plus rapide qui finira toujours par dépasser celle de n’importe quelle fonction polynomiale. On appelle ce type de croissance une croissance exponentielle (je vous laisse deviner pourquoi).
Puisque les fonctions exponentielles sont définies comme les prolongements continus des fonctions exponentielles sur , on peut être certain qu’elles sont… continues :
Proposition 2.2.6. Soit . La fonction est continue.
La limite en un point d’une fonction exponentielle est donc toujours égale à son image en ce point. Par ailleurs, on a :
Proposition 2.2.7. Soit .
Si , on a et .
Si , on a et .
Si , on a et .
Vient à présent un des résultats les plus importants au sujet des fonctions exponentielles. Celui-ci correspond à la bonne nouvelle selon laquelle notre définition des fonctions exponentielles comme prolongements continus des fonctions exponentielles sur permet de démontrer que les règles de calcul des exposants que nous avions pour les exposants rationnels fonctionnent également pour tous les exposants réels (même ceux qui ne sont pas rationnels). C’est également cette proposition qui permet de justifier la notation quelque peu abusive utilisée pour dénoter les images des fonctions exponentielles.
Proposition 2.2.8. Soient .
Pour tout , on a :
Pour tout , on a :
Pour tout , on a :
Pour tout , on a :
Pour tout , on a :
Avec cette dernière proposition, la notation pour les images des fonctions exponentielles prend tout son sens. En effet, on sait à présent qu’en plus de coincider avec les fonctions exponentielles sur , les fonctions exponentielles (pour ) possèdent les mêmes propriétés calculatoires que ces fonctions exponentielles sur . En fait, ce sont ces propriétés qui sont fondamentales et qui caractérisent principalement les fonctions exponentielles, en particulier la première : les fonctions exponentielles sont des fonctions définies sur qui transforment des sommes en produits !
2.3 La fonction exponentielle et le nombre ¶
Si cette limite existe, alors par linéarité des limites, pour tout , les limites suivantes existent également :
Et donc la fonction est aussi dérivable en tout . De plus, on remarque que si la fonction est dérivable en , alors pour tout on a :
Si les fonctions sont dérivables, alors pour tout la dérivée de est elle-même fois une constante et cette constante est le nombre dérivée de en .
La fonction sera une fonction qui est dérivable et qui est égale à sa propre dérivée ! Un tel nombre existe-t-il ? Oui : c’est le nombre dénoté habituellement par la lettre .
Théorème 2.3.1. (Théorème du nombre e)
Il existe un unique nombre tel que :
Ce nombre est noté et vaut approximativement :
Définition 2.3.2. La fonction exponentielle (naturelle) est la fonction et elle est généralement notée .
Étant donné l’existence (et l’unicité) du nombre , nous pouvons démontrer que la fonction exponentielle (de base ) est dérivable et égale à sa propre dérivée.
Proposition 2.3.3. La fonction exponentielle de base est dérivable et sa dérivée est égale à elle-même.
Soit quelconque. Montrons que la fonction est dérivable en et que le nombre dérivée de en vaut . Il faut donc montrer que :
Or, par le théorème du nombre , on sait que :
On a donc :
Par linéarité des limites, on a :
Remarque 2.3.4. C’est cette dernière proposition qui rend le nombre aussi incroyable : il s’agit de l’unique nombre réel strictement positif tel que l’exponentielle ayant pour base ce nombre est dérivable et égale à sa dérivée. Cette propriété du nombre fait qu’il possède un statut aussi important dans les mathématiques qu’une autre constante remarquable que vous connaissez bien : .
Remarque 2.3.5. La fonction exponentielle est une fonction extrêmement importante en analyse mathématique, en particulier dans la théorie des équations différentielles. Une équation différentielle est une équation dont la ou les inconnues ne sont pas des nombres mais des fonctions dérivables. L’exponentielle est l’unique solution qui vaut en à ce qui est peut-être la plus simple des équations différentielles intéressantes : .. math:: f=f’ Effectivement, l’exponentielle est bien une fonction égale à sa propre dérivée. Les équations différentielles sont extrêmement importantes en sciences. La formalisation de la plupart des phénomènes naturels passe par des équations différentielles.
Bien, nous avons donc montré que l’exponentielle de base est dérivable et nous nous sommes rendus compte qu’il s’agissait d’une fonction dérivable égale à sa propre dérivée. Qu’en est-il des autres fonctions exponentielles ? Pour le savoir, nous allons d’abord devoir parler des logarithmes qui sont les fonctions réciproques des fonctions exponentielles. Néanmoins, chaque chose en son temps : entraînons-nous d’abord à manipuler nos nouvelles fonctions de référence, les fonctions exponentielles.
2.4 Exercices¶
Exercice 2.4.1. En utilisant les propriétés élémentaires des fonctions exponentielles, calculer les nombres suivants sans avoir recours à une calculatrice.
Exercice 2.4.2. Donner les domaines de définition réels maximaux pour les fonctions dont les expressions sont les suivantes :
Exercice 2.4.3. En utilisant les règles de transformations des graphes et les propriétés des fonctions exponentielles, tracer les graphes des fonctions suivantes.
Exercice 2.4.4 Pour les fonctions suivantes, déterminer si elles convergent ou divergent pour et .
Exercice 2.4.5. Calculer les dérivées des fonctions dérivables suivantes.
Exercice 2.4.6. Donner l’équation cartésienne de la tangente au graphe de la fonction donnée ci-dessous au point d’abscisse .
Exercice 2.4.7. et Exercice 2.4.8.
Exercice 2.4.9. La fonction suivante possède-t-elle un maximum ? Si oui, quel est-il et quel est le point de maximum associé ?
Exercice 2.4.10. Donner une primitive de la fonction exponentielle.
Solution. La fonction exponentielle.
Exercice 2.4.11. Calculer les intégrales des fonctions intégrables suivantes.